Droit de la route
Me Leduc-Novi - 58 avenue du peuple belge, Lille
La reconnaissance d'une infraction
Existe-t-il une obligation à reconnaitre une infraction ?
Il n'y a, en droit français, nulle obligation faite à un usager de la route de reconnaitre l'infraction au Code de la route qui lui est reprochée. Plus généralement, nul ne peut être contraint de s'accuser lui-même et dispose d'un droit à garder le silence.
En revanche, nul ne doit s'extraire ou tenter de s'extraire aux contrôles de police et de gendarmerie, par quelque moyen que ce soit, en vue d'empêcher ces services de prouver que l'infraction est bien constituée. Ainsi, un usager de la route qui refuse de se soumettre à un contrôle d'alcoolémie est sanctionné au même titre qu'un individu en état de d'alcoolémie. Un usager de la route, qui utilise en conduisant un détecteur (ou avertisseur) de radar, commet une infraction. Un usager de la route commet un délit de fuite si, bien que responsable d'un accident, il fuit les lieux de l'accident. De même pour celui qui fuit un contrôle de police ou de gendarmerie.
Il est possible, généralement, de contester une infraction au Code de la route sous 2 motifs. Soit l'usager de la route conteste la constitution même de l'infraction qui lui est reprochée. Soit il se défend d'être l'auteur de l'infraction.
Dans le premier cas, l'usager ne conteste pas l'infraction en tant que telle (il ne cherche pas à dire que le dépassement de la vitesse autorisée n'est pas une infraction). Mais, il conteste la constitution (ou autrement dit la réalité) de l'infraction. C'est le cas lorsque le contrôle de police ou de gendarmerie n'est pas mené conformément à la législation ou la réglementation en vigueur (que ce soit par exemple parce que la procédure n'est pas respectée ou parce que les officiers de police ou de gendarmerie, ayant procédé au contrôle, ne sont pas dûment habilités à le faire).
Dans le deuxième cas, celui où l'usager de la route se défend d'être l'auteur de l'infraction, l'usager ne conteste pas, cette fois-ci, la réalité de l'infraction. Parfois, il ne conteste pas non plus que l'infraction ait bien été commise avec le véhicule dont il est propriétaire et dont il détient la carte grise. Mais il conteste être l'auteur de l'infraction, autrement dit avoir été au volant de son véhicule au moment de l'infraction. Cette ligne de défense est bien souvent adoptée, lorsqu'un usager de la route est flashé par un radar mais que seule sa plaque d'immatriculation est relevée.
Que risque-t-on, si on refuse de reconnaitre une infraction au Code de la route ? La garde à vue est-elle possible ?
Lorsque les forces de police ou de gendarmerie interpellent un usager de la route, le refus de ce dernier de reconnaitre l'infraction, qui lui est reprochée, n'engendre aucune sanction immédiate. Si un usager de la route interpellé refuse de reconnaitre l'infraction qui lui est reprochée, il n'a pas à s'en justifier, les officiers de police ou de gendarmerie ne peuvent que simplement en faire le constat. Ils ne peuvent, d'aucune manière que ce soit, prendre des sanctions envers lui, et encore moins le placer en garde à vue.
En revanche, il en est autrement d'un usager de la route qui refuse d'obtempérer (par exemple refuse de souffler dans un éthylotest lors d'un contrôle d'alcoolémie). Certaines infractions au Code de la route sont un motif de placement en garde à vue ou en cellule de dégrisement. La conduite en état d'alcoolémie, par exemple, justifie le placement de l'individu alcoolisé en cellule de dégrisement.
Il faut distinguer le fait de refuser de reconnaitre une infraction et l'infraction en elle-même. Une infraction grave au Code de la route peut entrainer le placement en garde à vue, quand bien même l'usager de la route refuserait de reconnaitre l'infraction (exemple: conduite en état d'alcoolémie, conduite avec de fausses plaques d'immatriculation). Mais le refus de reconnaitre une infraction (qui n'est pas en elle-même un motif de placement en garde à vue) n'entrainera jamais le placement en garde à vue.
Le refus de reconnaitre une infraction se matérialise par le refus de signer le procès-verbal et le refus de payer l'amende réprimant l'infraction. Ces 2 refus ne signifient pas pour autant la volonté de l'usager de la route de contester l'infraction qui lui est reprochée.
S'il veut contester une infraction au Code de la route, l'usager se doit de formuler, par lettre recommandée avec accusé de réception, une requête en exonération ou une réclamation motivée.
Un juge statue alors sur les suites à donner à la réclamation ou à la requête en exonération. Le juge apprécie, en droit et en fait, et au cas par cas, l'infraction commise (en fonction notamment des circonstances atténuantes ou aggravantes). Il faut savoir que s'il condamne le contrevenant, le juge dispose d'une entière liberté pour fixer la sanction pénale. La sanction (et notamment le montant de l'amende) peut ainsi être plus sévère ou moins sévère que celle initialement prévue par le Code de la route.
Après un délai de réflexion, si un usager de la route ne souhaite pas contester l'infraction qui lui est reprochée, il doit reconnaitre l'infraction en procédant au règlement de l'amende forfaitaire dans un délai de 45 jours s'il ne veut pas voir l'amende forfaitaire être majorée. Dans un délai de 3 jours s'il veut bénéficier d'une amende forfaitaire minorée et que l'avis lui est remis en main propre.
Peut-on contester une infraction après l'avoir reconnue ?
Toute procédure de contestation d'une infraction au Code de la route est généralement vouée à l'échec dès lors que l'usager de la route a préalablement reconnu la réalité de l'infraction. La reconnaissance d'une infraction peut être obtenue indirectement par les services de police et de gendarmerie par le paiement de l'amende. En effet, la procédure routière de reconnaissance d'une infraction amalgame le fait de reconnaitre une infraction et le fait de payer l'amende. Ce qui est une source de confusion pour bon nombre d'usagers de la route.
Le titulaire de la carte grise peut-il ne pas être l'auteur d'une infraction ? A-t-il l'obligation de dénoncer le véritable auteur ?
Lorsqu'une infraction au Code de la route est commise mais n'est pas suivie d'une interpellation par les services de police ou de gendarmerie, l'avis de contravention est envoyé au titulaire de la carte grise. Or, le titulaire de la carte grise peut ne pas être l'auteur de l'infraction. C'est, par exemple, le cas d'un particulier qui prête son véhicule ou qui vient de se faire voler son véhicule. Ou encore, d'une personne morale dont les salariés ont à leur disposition un véhicule de fonction.
Si le titulaire de la carte grise n'est pas l'auteur de l'infraction, il lui appartient de le contester. La contestation doit être envoyée par écrit à l'officier du ministère public. Dans le cas où le titulaire de l'infraction connaitrait l'auteur de l'infraction qu'il se voit reprocher, il ne lui est fait nulle obligation légale de le dénoncer.
Plus généralement, la justice française réprouve à utiliser la dénonciation ou la délation comme moyens pour confondre des contrevenants. Il est d'ailleurs bien difficile de trouver dans le Code pénal français, un seul article qui oblige un justiciable à la dénonciation. On peut toutefois songer à l'article 424-1 du Code pénal faisant obligation à une personne de dénoncer un crime (et encore, cet article est d'application restreinte) ou, à l'extrême limite, l'article 434-6 sur les actes de terrorisme.
Si le titulaire de la carte grise n'a aucune obligation légale de dénoncer l'auteur d'une infraction au Code de la route, même quand il le connait, il doit en revanche prouver qu'il n'est pas lui-même l'auteur de l'infraction s'il ne veut pas encourir de sanction.
Dans la mesure où il n'est pas prouvé que le titulaire de la carte grise est l'auteur de l'infraction (exemple: la photographie prise par le radar ne permet pas d'identifier le conducteur) et que parallèlement l'auteur de l'infraction n'est pas connue de la justice (exemple: le titulaire de la carte grise ne sait pas qui sait ou refuse de le dénoncer), la présomption de responsabilité pécuniaire s'applique. C'est à dire que le titulaire n'encourt ni retrait de points, ni suspension/annulation du permis de conduire, ni peine d'emprisonnement, mais reste redevable de l'amende.
Si le titulaire de la carte parvient à prouver qu'il n'est pas l'auteur de l'infraction, la présomption de responsabilité pécuniaire tombe. Dans ce cas, il n'a pas à payer l'amende. La preuve peut être rapportée par n'importe quel moyen (exemple alibi au moment de l'infraction).
Le relevé de la plaque d'immatriculation est-il une preuve de culpabilité ? Que faire en cas d'usurpation de la plaque d'immatriculation de son véhicule ?
Parfois lorsqu'une infraction est commise, seul le relevé de plaque d'immatriculation est possible. C'est notamment le cas, lorsque les radars flashent les usagers de la route par l'arrière. Or le relevé de la plaque d'immatriculation ne permet de remonter qu'au titulaire de la carte grise. Il ne permet de connaitre l'auteur de l'infraction.
Le relevé de la plaque d'immatriculation est, cependant, un élément de charge suffisant pour que le titulaire de la carte grise soit redevable de l'amende réprimant l'infraction, lorsqu'il ne parvient pas à prouver qu'il n'est pas l'auteur.
Le simple relevé de la plaque d'immatriculation pour confondre un usager de la route commettant une infraction au Code de la route apparait, de plus en plus aujourd'hui, comme insuffisant. En effet, le nombre de fraude à la plaque d'immatriculation explose depuis quelques années. Principale cause de cette explosion, l'extrême facilité de se procurer une plaque d'immatriculation dont on n'est pas le titulaire de la carte grise.
Les sanctions lorsqu'on commet cette fraude sont en revanche très lourdes. La fraude aux fausses plaques d'immatriculation est un délit passible de 7 ans de prison et de 30.000 euros d'amende.
Lorsqu'on est victime de cette fraude, il convient de ne surtout pas payer les avis de contravention que l'on est susceptible de recevoir et de déposer immédiatement plainte auprès d'un service de police ou de gendarmerie. Il convient ensuite de se rapprocher d'un avocat pour contester chaque infraction que l'on se voit reprocher. Il est très important de traiter le problème et de ne pas le laisser trainer (en pensant que l'on ne risque rien puisqu'on n'est pas l'auteur de l'infraction).
Car les conséquences peuvent être fâcheuses: retrait de points, invalidation du permis de conduire, amendes forfaitaires. Certaines infractions au Code de la route sont même passibles de peine de prison. Lorsqu'on est victime de cette fraude, il est aussi vivement conseillé de changer de plaque d'immatriculation. A minima pour prouver que l'on n'est pas l'auteur des infractions si celles-ci perdurent.
Infractions traitées
Evolution des infractions au Code de la route traitées entre 1993 et 2011
Source: Ministère de l'Intérieur p19
Gravité des infractions
Les contraventions de 3ème et 4ème classe constituent la majorité des infractions au Code de la route constatées en 2011
Source: Ministère de l'Intérieur p21
Principales infractions
En 2011, les 5 infractions les plus constatées, entrainant une perte de points, sont
- l'excès de vitesse < 20km/h hors agglomération (3,2 millions d'infractions)
- l'excès de vitesse < 20km/h en agglomération (1,7 millions d'infractions)
- l'excès de vitesse de 20 à 30 km/h (0,5 millions d'infractions)
- l'inobservation de l'arrêt au feu rouge (0,5 millions d'infractions)
- le téléphone au volant (0,5 millions d'infractions)
Source: Ministère de l'Intérieur p9
Infractions par département
Marseille, Lille, Lyon, Versailles, Bordeaux sont les chefs-lieux des départements où l'on relève en 2011 le plus d'infractions au Code de la route, sanctionnées par un retrait de points
- Les Bouches du Rhône: 285.366 infractions
- Le Nord: 248.569 infractions
- Le Rhône: 238.481 infractions
- Les Yvelines: 203.256 infractions
- La Gironde: 189.835 infractions
Note: cette analyse est à pondérer en fonction du trafic routier et des moyens mis en oeuvre pour détecter les infractions dans chaque département
Mende, Guéret, Cayenne, Aurillac, Ajaccio sont les chefs-lieux des départements où l'on relève en 2011 le moins d'infractions au Code de la route sanctionnées par un retrait de points
- La Lozère: 7.259 infractions
- La Creuse: 12.118 infractions
- La Guyane: 12.363 infractions
- Le Cantal: 14.341 infractions
- La Corse du Sud: 16.204 infractions
Source: Ministère de l'Intérieur p28
Evolution des infractions par département
Cayenne, Epinal, Nîmes, Nevers, Saint-Lô sont les chefs-lieux des départements où l'on relève en 2011 le plus d'infractions au Code de la route, sanctionnées par un retrait de points
- La Guyane: + 50 %
- Les Vosges: + 50 %
- Le Gard: + 43 %
- La Nièvre: + 41 %
- La Manche: + 38 %
Note: cette analyse est à pondérer en fonction du trafic routier et des moyens mis en oeuvre pour détecter les infractions dans chaque département
Basse-Terre, le Puy-en-Velay et Arras sont les chefs-lieux des 3 départements où le nombre d'infractions a diminué entre 2010 et 2011
- La Guadeloupe: - 11 % infractions
- La Haute Loire: - 3 % infractions
- Le Pas de Calais: - 1 % infractions
Source: Ministère de l'Intérieur p28
Responsabilité pécuniaire
Dans le Code de la route
- articles L121-1, L121-2, L121-3: champ de la responsabilité du titulaire de la carte grise
Prescription de l'action publique
Dans le Code de procédure pénale:
- articles 8 et 9: délai de prescription de l'action publique (délit et contravention)
Usurpation de la plaque d'immatriculation
Dans le Code de la route
- article L317-4-1: sanction en cas de délit de fausse immatriculation